Magnitudes

La luminosité des étoiles

Hipparque de Nicée (190 av. J.-C.-125 av. J.-C.), deux siècles avant notre ère, répertorie environ 850 étoilesÉtoile : elle se forme à partir d'un nuage de gaz qui s'effondre sous l'effet de la gravitation. Si la masse du nuage est suffisamment importante, la concentration de la partie centrale peut atteindre les conditions nécessaires aux réactions thermonucléaires.
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visibles à l'œil nu en six classes de grandeur. À cette époque, les « astres fixes » (comprendre les étoiles, distinguées des « astres errants » que sont les planètesPlanète : nom initialement attribué aux points lumineux vagabondant parmi les étoiles, planêtos signifie « astres errants » en grec.
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) sont tous considérés comme étant à la même distance. Il est logique de penser que les plus lumineux sont tout simplement les plus grands. Les étoiles de « première grandeur » sont donc celles qui sont visibles juste après le couchant et celles à la limite de la perception sont classées à la sixième.
Cette échelle fut reprise par PtoléméePtolemaeus Claudius, dit Ptolémée
Très peu d'éléments de la vie de Ptolémée sont connus, mais on le sait auteur de plusieurs ouvrages scientifiques, dont deux feront autorité jusqu'à la Renaissance (l'Almageste et Géographie)…
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(entre 87 et 100-vers 170) en 137 de notre ère dans son Mathematike Synthasis qui nous est parvenu sous le nom d'Almageste. Cette vaste compilation du savoir scientifique accumulé depuis l'Antiquité intègre également un catalogue de 1022 étoiles.
Les moyens d'observation se perfectionnant, il devint nécessaire d'élargir et surtout de préciser la mesure de l'intensité lumineuse des étoiles. Ce domaine de l'astronomie s'appelle la photométrie.

Luminosité et distance

La luminosité d'une étoile est la quantité d'énergie lumineuse totale émise par unité de temps, elle est notée L.
Les photons se propagent à la vitesse d'environ 300 000 km·s−1. À une distance d de l'étoile, ils se répartissent sur une sphère de même rayon dont la surface vaut 4π d2. À une distance plus importante, notée D, la surface de la sphère devient 4π D2, le rapport du nombre de photons reçus par une même unité de surface suit la relation d2/D2.
Pour une étoile située à une distance D, l'énergie reçue par seconde (notée E) par unité de surface est proportionnelle à L et inversement proportionnel au carré de la distance : E = L /4π D2.
En 1729, le physicien et mathématicien français Pierre Bouguer (1698-1758) démontre que la différence perceptible entre deux sources lumineuses n'est dépendante que du rapport de leurs intensités. En 1859, le psychologue allemand Gustav Fechner (1801-1887) précise que la sensation varie comme le logarithme de l'intensité de la stimulation.

Magnitude apparente (ou visuelle)

Norman Pogson (1829-1891) proposa en 1856 qu'à une différence de 5 grandeurs corresponde un rapport de 100/1 afin de retrouver entre les étoiles les mêmes différences de luminosité que dans l'ancienne classification. L'appellation fut remplaçée par magnitude (notée m ; du latin magnitudo = grandeur, puissance), ce terme ne devant plus créer de confusion avec le concept de dimension.
Ainsi pour une différence de 1 magnitude, leur luminosité diffère d'un facteur égal à la racine cinquième de 100, soit 2,512 (2,5125 = 100,02).
Les éclats apparents sont donc mesurés dans cette échelle logarithmique selon la loi de Pogson, soit : m = −2,5 log E + k (où E est l'éclat stellaire et k une constante).
Pour les magnitudes apparentes, le niveau zéro de cette échelle a été arbitrairement attribué à une série d'étoiles étalons et le rapport entre chaque magnitude est donc d'un facteur 2,5. Plus l'éclat d'un astre est faible, plus la valeur de sa magnitude augmente. Autrement dit : à une augmentation de magnitude correspond une diminution de l'intensité lumineuse. L'usage est donc contraire aux magnitudes d'un séisme sysmique utilisées en géophysique où la magnitude augmente avec l'intensité.
Une étoile de magnitude 6 est ainsi  100 fois plus faible que celle de magnitude 1 ; une étoile de magnitude 0 est 2,5 fois plus brillante qu'une étoile de magnitude 1 ; de même, elle est 2,5 fois moins brillante qu'une étoile de magnitude −1.
Ainsi pour deux étoiles A et B on a : mA − mB = −2,5 log (EA / EB) et à une différence de n magnitudes correspond un rapport de 2,512n.
Cette échelle a permis d'attribuer à certaines étoiles très brillantes des magnitudes négatives : SiriusSirius
C'est l'étoile la plus brillante de tout le ciel, elle est la sixième par ordre de distance au Soleil.
Sirius
a une magnitude de −1,45. Elle est évidemment applicable aux planètesPlanète : nom initialement attribué aux points lumineux vagabondant parmi les étoiles, planêtos signifie « astres errants » en grec.
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, astéroïdesAstéroïde : petit corps orbitant autour du Soleil et dont la plus grande dimension ne dépasse pas quelques centaines de kilomètres.
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, comètes…
La magnitude apparente du SoleilSoleil
Le Soleil n'est que l'une des 100 milliards d'étoiles qui constituent notre Galaxie.
Étoile Soleil
est de −26,75 ; celle de la LuneLune
Le couple Terre-Lune peut être considéré comme une planète double qui orbite autour du Soleil à partir d'un centre de gravité commun…
Lune
(lors d'une Pleine Lune) vaut −12,7 et VénusVénus
Ses élongations maximales approchent les 48° et, en raison de son albédo élevé, elle peut être observée plus facilement que Mercure…
Planète Vénus
à son maximum se voit attribuer celle de −4,4. À l'œil nu, il est théoriquement possible de distinguer les étoiles jusqu'à la magnitude 6,5. Dans la réalité, l'absorption atmosphériqueAbsorption atmosphérique : fraction de la lumière d'un astre ne parvenant pas à l'observateur et dont la valeur est proportionnelle à l'épaisseur de la couche atmosphérique traversée.
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(et la pollution lumineuse !) limite cette perception à la magnitude 3 près de l'horizonHorizon : projection sur la sphère céleste du plan horizontal passant par le point de vision de l'observateur.
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, en périphérie des villes la magnitude est d'environ 3,5 au zénithZénith : point de projection sur la voûte céleste de la droite partant du centre de la Terre et passant à l'aplomb d'un lieu, soit à 90° de hauteur au-dessus de l'horizon.
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, une bonne paire de jumelles permet d'accéder à la magnitude 10 environ. Les grands télescopes terrestres permettent d'atteindre la magnitude 27 ; le télescope spatial Hubble atteint la magnitude 30.

Magnitude absolue

La magnitude apparente, comme son nom l'indique, ne donne d'indication que sur l'éclat apparent et non l'intensité réelle de la lumière émise. En effet, elle ne tient pas compte de la distance qui nous sépare du corps observé et ne permet pas de comparer ses propriétés à celles d'autres astres, tous situés à des distances différentes.
Afin de comparer la luminosité des étoiles, il a été nécessaire de définir une échelle de magnitude absolue (notée M) qui correspond à la magnitude qu'aurait l'astre s'il était placé conventionnellement à une distance de 10 parsecsParsec : distance depuis laquelle le demi-grand axe de l'orbite terrestre devrait être vu sous un angle de 1", elle vaut 3,26 années lumière.
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. L'éclat absolu caractérise une étoile et c'est une véritable donnée physique, il peut être déduit de son spectreClasse spectrale : classification des étoiles en fonction de la distribution de leur rayonnement électromagnétique, qui dépend essentiellement de la température de surface, instaurée par l'observatoire de Harvard au début du XXe siècle.
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. On peut également le déterminer à partir de la parallaxeParallaxe : regardée alternativement avec chaque œil, la projection du pouce, main tendue, ne se retrouve pas devant les mêmes éléments d'un décor : c'est l'effet de parallaxe. La parallaxe est d'autant plus petite que l'objet visé est lointain.
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, méthode qui devient totalement inapplicable pour les distances supérieures à environ 300 années lumièreAnnée lumière : unité de distance correspondant à celle parcourue par la lumière (dans le vide) en un an.
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.

Magnitude absolue
Luminosité intrinsèque et distance
La magnitude apparente m, la magnitude absolue M et la distance d (exprimée en parsecs) sont liées par la relation : m − M = 5 log d − 5 La quantité (m − M) est appelé le module de distance de l'étoile, il ne dépend pas de sa luminosité intrinsèque mais uniquement de sa distance.
L'éclat d'une source lumineuse perçue par notre œil dépend à la fois de sa luminosité intrinsèque et de sa distance. Quand la distance double, pour une même luminosité, l'éclat est quatre fois moindre ; ainsi une lampe de 50 watts située à 20 mètresMètre : longueur originellement définie comme la dix millionième partie du quart d'un méridien terrestre.
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est perçue avec le même éclat qu'une lampe de 200 watts située à 40 mètres.
L'éclat apparent (pour une étoile on parle de magnitude apparente) est le paramètre observable, mais il ne renseigne en rien sur la luminosité propre. Si l'on veut mesurer la distance d'une lampe il faudrait connaître le nombre de watts.
Deux étoiles de même type spectral ont les mêmes caractéristiques physiques et la même magnitude absolue. À partir de sa magnitude apparente, il est donc possible de retrouver la distance d'une étoile.

Magnitudes du Lion
Magnitudes apparentes (en jaune) et absolues (en rouge) des étoiles principales du Lion